« Vous devriez aller à Mardin ! » Mardin ? Ce nom nous était complètement inconnu quand nous l’avons entendu pour la première fois. C’est Marie-Eva qui nous en a parlé quand nous l’avons rencontrée à Yazd, en Iran. Elle voyageait avec ses deux copines et avait vécu en Turquie. Mais elle n’avait jamais eu la chance d’aller à Mardin. « Vous devriez vraiment y aller » dit-elle à nouveau. « Mais vérifiez la sécurité avant, c’est près de la Syrie ». Après avoir vu que le niveau de sécurité de la région était correct, pour nous « près de la Syrie » signifiait qu’il n’y aurait pas de tourisme de masse. C’était donc l’endroit parfait à découvrir.
La route de Van à Mardin dans le sud-est de la Turquie fut magnifique. Nous avons traversé des montagnes, des vallées vertes et encore des montagnes. Nous avons traversé le petit village de Hasankeyf avec ses maisons troglodytes. Ce village ancien est malheureusement menacé d’être inondé à cause de la construction d’un barrage. Nous n’avons pas eu l’occasion de prendre des photos car notre minibus roulait vite sur la route sinueuse. Les habitudes de conduite des chauffeurs de bus turcs n’étaient pas meilleures que celles des Iraniens… Et enfin nous avons vu Mardin, perchée au sommet d’une colline dominant les interminables plaines de Mésopotamie. Une vue à couper le souffle !
Stratégiquement situé, Mardin a été successivement habitée par des chrétiens, des arabes, des mongols… un véritable creuset de religions et de civilisations. En 1516, la ville fait partie de l’Empire ottoman. À la fin du XIXème siècle, la moitié de sa population est chrétienne. Pendant la Première Guerre mondiale, sa population chrétienne est persécutée, en particulier 20 000 personnes sont tuées ou déportées dans le génocide assyrien et le génocide arménien.
Mais aujourd’hui, le côté historique de Mardin reste présent à travers son architecture Artuqid (du nom de la dynastie qui a régné sur la région au XIIème siècle). En nous promenant dans la vieille ville, nous avons pu admirer de sublimes décorations sur les maisons en pierre, des portails sculptés et des portes. Les minarets étaient également magnifiques, dorés sous la lumière du soleil. Nous avons eu un grand plaisir à marcher dans la ville, à nous perdre dans les rues minuscules, à découvrir de beaux murs sculptés à chaque coin de rue, et à profiter des vues sur les plaines de la Mésopotamie en contrebas. Sauf pour la route principale, la vieille ville est piétonne et pour ramasser les ordures, un homme parcourait les rues en pente avec son âne en guise de camion poubelle.
Au coucher du soleil, nous avions l’habitude d’aller manger dans notre restaurant préféré, Seyr-i Merdin, avec sa terrasse tranquille surplombant la vallée. Nous prenions presque toujours de délicieux Zirh Kebab et finissions le repas avec un thé offert par la maison. Nous avions aussi trouvé un super endroit où séjourner : Dara Konagi, une charmante et ancienne maison avec des chambres comme si vous étiez à l’époque de la route de la soie. Nous étions les seuls touristes occidentaux dans les rues, et je pense qu’il n’y avait pas beaucoup de touristes turcs non plus. Alors les gens nous regardaient avec curiosité jusqu’à ce que nous disions avec un sourire « Merhaba » qui signifie Bonjour en turc. Ils répondaient alors avec un grand sourire et posaient leur main droite sur leur cœur. En Turquie, les gens semblent plus réservés qu’en Iran. Mais une fois la glace brisée, ils sont tout aussi charmants.
Nous avons passé quelques jours à Mardin et nous aurions bien voulu y rester plus à cause de son atmosphère paisible. Notre immersion en Mésopotamie nous avait donné envie de découvrir plus sur cette plus ancienne partie habitée du monde et la région de la plupart des récits bibliques. Donc, pour notre prochaine destination, nous n’avons pas trop réfléchi. Nous n’étions qu’à quelques heures d’Urfa (ou Sanliurfa) qui est réputée pour être le lieu de naissance du Prophète Abraham (au moins pour les musulmans, pour les chrétiens c’est ailleurs). Nous ne pouvions pas le manquer !